La dentelle de Balakhna

La même amie russe qui m'avait fait connaître la dentelle de Ielets m'avait aussi introduite à la dentelle de Balakhna, une petite ville de la région de Nijni-Novgorod. Dans l'article suivant, j'avais mis une petite vidéo à son sujet. Comme cette dentelle ne m'intéressait pas, je n'avais jamais creusé et mais elle est revenue aujourd'hui sur la table avec une collègue, alors j'ai décidé de pousser un peu la recherche. Ça n'a pas dépassé ... l'après-midi.



Premièrement, j'ai trouvé une vidéo de plus, une seule, ce qui m'en donne maintenant trois (seulement), toujours avec la même personne, Galina Kotova, maître dentellière. Puis, quelques pages web. Je suis tombée sur celle-ci en quelques-clics. J'en ai fait la traduction mais je ne partage avec vous que la partie la plus significative. En fait, je m'attendais à une manufacture ici aussi mais c'est tout autre chose.

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L’histoire de la dentelle nous conduit en Europe occidentale au XVIe siècle. L'Italie, la Belgique et la France contestent le droit d'être appelée le berceau de la dentelle.

La dentelle russe est apparue au XVIIe siècle. Elle a non seulement préservé et développé les meilleures traditions des maîtres des pays européens, mais elle est également devenue un véritable phénomène artistique national, dont l'indépendance s'exprime par la richesse des couleurs, la variété des techniques et le caractère graphique de l'ornement. Au début du 20ème siècle, dans dix-sept provinces de Russie, plus de cent mille artisanes dentellières étaient engagées dans la fabrication de la dentelle.

L’un des centres célèbres de la fabrication de la dentelle aux XVIIIe et XIXe siècles était cette cité antique de la Volga - Balakhna.

Depuis des temps immémoriaux, Balakhna est réputée pour son artisanat distinctif: salinisation, construction navale, fabrication de briques et de tuiles, forge et poterie, fabrication de cloches, ... Par conséquent, la fabrication la dentelle a trouvé ici un terrain fertile pour son développement. Et elle a apporté
en même temps une renommée internationale à la ville.

L'artisanat couvrait 225 villages du district, dans la province de Nijni-Novgorod, où plus de deux mille artisanes fabriquaient de la dentelle. Elles utilisaient principalement de la soie blanche, crème et noire. Elles employaient aussi des fils de coton et de lin.


Une des particularités de la dentelle de Balakhna était la technique de tissage que les Russes appellent à paires multiples - la plus difficile et la plus longue. Ce genre de dentelle utilise un grand nombre de fuseaux, pouvant atteindre jusqu'à 300 paires ou plus. La valeur de la dentelle dépendait de la pureté du tissage, du poids, du nombre de fuseaux utilisés.

Les dentellières de Balakhna ont créé un «style de Balakhna». Son originalité résidait dans la légèreté des réseaux de tulle, sur lesquels s'essaimaient d'épais bouquets de fleurs et de grappes de raisin. Les mouchoirs en dentelle de soie avec raisins ont toujours fait la fierté des maîtres de Balakhna. Selon les contemporains, ces mouchoirs étaient alors en concurrence avec la dentelle belge du Brabant.

Les motifs connus sous les noms de "rose de Balakhna" et "concombre" étaient également intéressants. La «rose de Balakhna» était devenue une sorte de carte de visite de la dentelle locale. Selon une légende, des dentelles blondes portant des roses écarlates, entourées d'un cordonnet blanc sur fond beige doré, auraient été commandées par Catherine II elle-même à des maîtres de Balakhna.

Au début du XXème siècle, l'industrie de la dentelle à Balakhna s'est progressivement estompée. La dentelle de Balakhna n'était pas concurrentielle par rapport aux autres centres: la technique de tissage plus laborieuse et le coût élevé des matières premières - la soie fine - ont été les principales raisons de ce crépuscule. Malgré le goût pour la dentelle, les prix à la foire de Nijni-Novgorod étaient bas.

En 1912, l’administration provinciale tenta de relancer la meilleure entreprise de Balakhna. Une école de dentellières fut ouverte. Au début, vingt-trois élèves s'inscrirent, puis chaque année, le nombre diminua et, en 1915, l'école fut fermée.

Actuellement, une riche collection de dentelle de Balakhna, avec plus de 500 pièces, est conservée dans le musée d'histoire locale de la ville.


Il convient également de rappeler que la dentelle aux fuseaux de Balakhna se distingue par la technique des paires multiples. Le nombre de paires de fuseaux peut atteindre 500! En cours de travail, le nombre de paires ne change pas, le produit est réalisé sur toute la largeur, ce qui rend la réalisation très difficile, mais elle permet de créer un tulle extrêmement fin et doux. Je propose de voir l'histoire la plus intéressante, tournée en 2011 par la chaîne de télévision «Zagorodnaia jizn». Maître de la dentelle, membre de l'Union des artistes de Russie, responsable de l'atelier folklorique "Balakhna Patterns", Galina Kotova parle de l'art à laquelle elle a consacré sa vie.

(La vidéo qui suit dans la page originale est longue de 26 minutes. Je vous en fais grâce.)

La dentelle de Balakhna ne meurt pas grâce à de vrais ascètes, des passionnées telles que Galina Aleksandrovna Kotova et Galina Viktorovna Muraviova, qui non seulement connaissent les arcanes de l'art ancien, mais les développent de manière innovante, les enseignent à toutes celles qui veulent ce métier difficile, sans compter les expériences créatives avec des collègues dentellières, de non seulement d'autres villes de la Russie, mais aussi de l'étranger. Galina Viktorovna est engagée dans l'histoire du commerce de la dentelle en Russie et intervient lors de conférences internationales. Vous pouvez lire ses articles dans le groupe ouvert Club des amoureux de la dentelle du réseau social VKontakte. 
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Alors voilà. Une dentelle qui était morte mais qui cherche à renaître par la grâce de deux apôtres dévouées. VKontakte est l'équivalent russe de Facebook.

À tout hasard, je répète ici la vidéo (moins de 2 minutes et demi) de mon article, prise dans un musée (je n'arrive pas à lire si c'est celui de la ville) avec en prime des images de Mme Kotova.


La capture d'écran au début de l'article vient de la vidéo suivante: https://www.youtube.com/watch?v=IGaP-0YBJF8

2 commentaires:

  1. Que de merveilles, je ne comprends pas le russe, mais j'admire toute cette délicatesse. Merci de me faire connaître et d'avoir écrit un si bel reportage.

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